DE L’INVENTION DU MOYEN TERME

 

SAINT THOMAS D'AQUIN, DOCTEUR DE L'ÉGLISE

 

OPUSCULE 49

(Œuvre non authentique. Auteur ignoré)

Traduction Abbé Védrine, Editions Louis Vivès, 1857

Édition numérique, https://www.i-docteurangelique.fr/DocteurAngelique, 2004

Les œuvres complètes de saint Thomas d'Aquin

 

 

 

INTENTION:

Comme le moyen terme est le principe pour réduire une proposition en syllogisme, afin donc d’avoir pour chaque proposition un mode d’argumentation, nous allons déterminer la manière de trouver le moyen terme.

 

Les propositions étant les unes universelles, les autres particulières, et parmi les universelles les unes affirmatives, les autres négatives, nous allons d’abord nous occuper de la manière de trouver le moyen terme pour mettre en syllogisme l’universelle affirmative. Il faut donc dire que, pour réduire en syllogisme l’universelle affirmative, il faut prendre pour moyen ce qui suit le sujet et précède le prédicat. En voici la raison c’est que l’universelle affirmative ne se met en syllogisme que dans le premier mode de la première figure; mais il faut en cela que dans le syllogisme le moyen précède le prédicat de la proposition, puisqu’il lui est soumis universellement, et suive le sujet de la même proposition, puisqu’il se dit universellement de lui. Par exemple, si l’on a à réduire en syllogisme cette proposition: tout homme est animal, son moyen convenable sera susceptible de rire, parce que cela suit toujours le sujet dans la conséquence, et précède le prédicat, et l’on dira, tout ce qui est susceptible de rire est animal, tout homme est susceptible de rire, donc tout homme est animal. Pour mettre en syllogisme l’universelle négative, il faut prendre pour moyen ce qui suit le sujet et répugne au prédicat, et cela par rapport au second mode de la première figure et au premier de la seconde; ou bien ce qui répugne au sujet et suit le prédicat par rapport au second mode de la seconde figure, et la raison de cela est que l’universelle négative ne se met en syllogisme que dans ces trois modes, et dans les deux premiers modes le moyen terme suit le sujet et répugne au prédicat. Dans le troisième le moyen répugne au sujet et suit prédicat. Par exemple, si l’on veut mettre en syllogisme cette proposition: nul homme n’est pierre, son moyen convenable dans les deux premiers modes est susceptible de rire, parce qu’il suit le sujet et répugne au prédicat. Dans le troisième syllogisme le moyen convenable est insensible, parce qu’il répugne au sujet et suit le prédicat. Pour mettre en syllogisme la particulière affirmative, il faut prendre pour moyen ce qui suit le sujet et précède le prédicat, et précède le sujet et le prédicat. La raison de cela, c’est que la particulière affirmative ne conclut que dans la première et la troisième figure; et pour qu’elle con clue dans la première il faut que le milieu précède le prédicat et lui soit soumis, il faut aussi qu’il suive le sujet lorsqu’il se dit de lui. Mais si l’on conclut dans la troisième figure il faut que le moyen précède l’un et l’autre, c’est-à-dire, le sujet et le prédicat, puisqu’il est soumis à l’un et à l’autre. Par exemple, pour mettre en syllogisme cette proposition: quelque animal est substance, le moyen convenable dans la première figure est sensible, parce qu’il suit le sujet et pré cède le prédicat. Dans la troisième figure le moyen convenable est homme, parce qu’il précède le sujet et le prédicat. Pour réduire en syllogisme la particulière négative, il faut prendre pour moyen ce qui suit le sujet et répugne au prédicat, ou ce qui répugne au sujet et suit le prédicat, et en voici la raison, c’est que la particulière négative se conclut dans toute figure, et si l’on tire la conclusion dans la première, il faut que le moyen suive le sujet, puisque il se dit de lui, et répugne au prédicat, puisqu’il en est écarté. Mais si l’on conclut dans la seconde figure, il faut que le m suive le sujet et répugne au prédicat, par rapport au troisième mode, ou qu’il répugne au sujet et suive le prédicat par rapport au quatrième. Si l’on conclut ans la troisième, il faut que le moyen précède le sujet, puisqu’il lui est soumis, et qu’il répugne au prédicat, puisque le prédicat en est écarté. Par exemple, si l’on veut mettre en syllogisme cette proposition: quelque homme n’est pas âne, le moyen convenable dans la première figure et même dans le troisième mode de la seconde figure est susceptible de rire, lequel suit le sujet et répugne au prédicat. Dans le quatrième mode de la seconde figure le moyen convenable est susceptible de rire qui répugne au sujet et suit le prédicat. Le moyen convenable dans la troisième figure est susceptible de rire, qui précède le sujet et répugne au prédicat. Car les choses convertibles précèdent et suivent celles avec lesquelles elles sont convertibles, c’est pour cela que susceptible de rire précède et suit l’homme.

Fin du quarante-neuvième Opuscule de saint Thomas d’Aquin sur la manière de trouver le moyen terme.